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La Russie coupée du monde culturel

3 Mar 2022

 

Alors que les sanctions contre la Russie se durcissent, le milieu culturel
n’est pas épargné : de nombreux événements en Europe vont être
affectés par le gel des échanges.

par Jordane de Faÿ, Aison Moss, Rafael Pic et Jade Pillaudin

 

Suite à l’agression contre l’Ukraine, la Russie voit les portes de l’Occident
se fermer : elle a été exclue de nombreuses manifestations dont elle était une
vieille habituée, de la Coupe du monde de football à l’Eurovision, de l’Euroligue
de basket aux concerts du chef d’orchestre Valery Gergiev, de la mission sur
Mars au Comité international olympique. Quand il ne s’agit pas d’une mesure
de rétorsion, ce sont les participants qui décident de jeter l’éponge comme
ce lundi avec les membres du pavillon russe de la Biennale de Venise.
Le spectacle vivant sera particulièrement touché avec la fin de tournées
de ballets, musiciens, troupes de théâtre. Dans le domaine de l’architecture, on
peut prédire un ralentissement des chantiers en cours : si les tours jumelles
Hermitage à la Défense n’avaient pas été abandonnées en janvier dernier, il y a
fort à parier que la décision aurait été prise maintenant.

 

Morozov, un test

Dans un milieu de l’art globalisé, les grandes expositions blockbusters sont
inséparables des prêts entre pays. En ce moment, l’exemple le plus
emblématique au niveau mondial est la collection Morozov montrée à la
Fondation Louis Vuitton : plusieurs années de négociation et l’onction de
Vladimir Poutine lui-même ont été nécessaires pour déplacer ces chefs-d’oeuvre
dont la valeur d’assurance est gardée secrète mais dépasse le milliard d’euros.

Le coût des transports (une quarantaine de convois) mais aussi l’engagement
de Louis Vuitton à financer des restaurations ou des chantiers de modernisation
des musées à Moscou ou Saint-Pétersbourg s’inscrivent dans un véritable
partenariat à moyen terme. Comme pour le précédent opus consacré à
la collection Chtchoukine (1,2 million de visiteurs), le succès est au rendez-vous :
par une coïncidence scabreuse, l’exposition a dépassé le million d’entrées
le 23 février, à la veille de l’attaque russe… Des voix se sont vite élevées pour
demander la saisie de cette collection unique. Ce serait un précédent qui
contreviendrait à la législation en vigueur. L’article 61 de la loi du 8 août 1994
stipule en effet : « Les biens culturels prêtés par une puissance étrangère,
une collectivité publique ou une institution culturelle étrangères, destinés à être
exposés au public en France, sont insaisissables pour la période de leur prêt à l’État
français ou à toute personne morale désignée par lui. Un arrêté conjoint du ministre
de la Culture et du ministre des Affaires étrangères fixe, pour chaque exposition,
la liste des biens culturels, détermine la durée du prêt et désigne les organisateurs
de l’exposition. » ll faudrait donc une loi ad hoc ou faire en sorte que l’on entre
dans une zone grise avec l’expiration de l’arrêté d’insaisissabilité. Le premier a
été pris le 19 février 2021 puis renouvelé le 6 janvier 2022, en raison de
la prolongation de l’exposition jusqu’au 3 avril. Son effet se maintiendra un bon
mois après la fermeture, jusqu’au 15 mai (délai supplémentaire initialement
conçu pour permettre un retour confortable des oeuvres). Il est à noter que sur
les sept musées couverts, cinq sont russes (galerie Trétiakov, musée Pouchkine
et Fondation culturelle Ekaterina à Moscou ; musée russe et musée de l’Ermitage
à Saint-Pétersbourg), un biélorusse (musée national des Beaux-Arts de Minsk)
et un ukrainien (musée des Beaux-Arts de Dnipropetrovsk). Un cas de figure
comparable se pose en Angleterre avec la collection Fabergé actuellement
présentée au V&A de Londres.

 

Louvre et Orsay attentistes

Qu’en est-il des grandes institutions publiques ? « Le musée du Louvre est en lien
constant avec son ministère de tutelle – le ministère de la Culture – et le ministère de
l’Europe et des Affaires étrangères quant au suivi des projets, des oeuvres et des
agents qui seraient potentiellement impactés par les évènements qui touchent
l’Ukraine comme la Russie », nous fait savoir le musée, signalant qu’il n’y a aucun
projet d’exposition en cours ou à venir avec des institutions russes ou
ukrainiennes. En revanche, il prête actuellement 6 oeuvres (dont un dépôt
à Versailles) au musée du Kremlin à l’exposition intitulée « Duel. From trial by
combat to noble crime », prévue du 3 mars au 16 juin (les départements concernés
étant Objets d’art, Peintures et Arts graphiques), dont l’ouverture est évidemment
remise en question. Le musée n’a pas de prêt en Ukraine. En ce qui concerne ses
agents, trois étaient à Moscou ces derniers jours, dans le cadre du suivi des prêts
au musée du Kremlin, et sont désormais revenus en France.
Christophe Leribault, président du musée d’Orsay, curieux des scènes nordiques
et centre-européennes,avait fait de son côté, peu avant le lancement de l’offensive,
un déplacement en Russie pour explorer des pistes d’avenir :
« Il n’y avait aucun projet russe dans le calendrier des expositions programmées
par mon prédécesseur pour les prochaines années. J’aurais bien sûr aimé reprendre
le flambeau dans la suite du succès de la rétrospective Repine au Petit Palais.
Les conditions ne sont malheureusement plus réunies. » Le Centre Pompidou a de son côté
le regard tourné vers ses prêts dans les pays limitrophes de l’Ukraine,
potentiellement impactés par la guerre : « Nous n’avons pas d’oeuvres en prêts actuellement
en Russie ou en Ukraine, mais nous avons des prêts en cours en Hongrie, Pologne
et Roumanie. Bien entendu, le musée national d’Art moderne échange avec ces institutions
mais pour l’heure, il n’y a pas de changement par rapport au contexte international. »

 

Rapatriements in extremis

Certaines expositions ont effleuré de justesse les problèmes de rapatriement.
Pour Repine, qui a attiré 130 000 visiteurs et qui a fermé le 23 janvier au Petit
Palais, les oeuvres ont été réceptionnées en Russie il y a une dizaine de jours,
juste avant le déclenchement de l’offensive. Dans le sens inverse, c’est le même
cas au musée Pouchkine de Moscou, avec l’exposition qui mettait à l’honneur
une partie de la donation de dessins de Florence et Daniel Guerlain au Centre
Pompidou. Jusqu’au 30 janvier – date de la fin de l’exposition – les salles des arts
d’Europe et d’Amérique des XIXe et XXe siècles abritaient une sélection
des oeuvres, qui sont revenues à bon port in extremis. Florence Guerlain signale
cependant des tensions de plus en plus évidentes au sein de l’institution russe
durant l’organisation de l’exposition, palpables malgré le « silence absolu »
de leur part. « Nous avons tardé à avoir des nouvelles des oeuvres. Elles ont mis
longtemps à revenir », explique-t-elle.

 

Matisse en Chine, victime collatérale

En région, le département du Nord a été le premier à prendre des mesures
radicales pour pallier l’incertitude géopolitique des prochains mois : vendredi
25 février, on apprenait la suspension du prêt de 280 oeuvres appartenant

La Russie coupée du monde culturelVendredi 25 février, on apprenait via communiqué la suspension du prêt à la Chine de 280 oeuvres appartenant au musée Matisse du Cateau-Cambrésis.
© Photo Richard Soberka/hemis.fr.

Source LE QUOTIDIEN DE L’ART